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3 avril 2014

"Dans le peau de l'ours"

Le monde de la performance artistique a toujours charrié du boire et du manger. Comme tous les mouvements artistiques, me direz-vous ? Il convient donc toujours d’être vigilant, en particulier dans cette époque de grand mélange médiatique ou le vrai du faux ne se distinguent quasiment plus.
Avec « Dans la peau de l’ours » la performance de Abraham Poincheval au musée de la chasse et de la nature, on atteint un sommet de non sens idéologique, de bricolage conceptuel post-new age, et de greenwashing narcissique.

Le descriptif de la performance est déjà un joli morceau de mièvrerie dialectique : "Comme l’ours, il est placé en état d’hivernation. Comme lui, il se nourrit de végétaux herbacés, de baies, d’insectes, de miel et de fruits". On parle ici de l’artiste performer bien entendu. Ils auraient du ajouter : « comme lui, il vit dans un hotel particulier du XVII/XVIIème siècle, au chaud, il dort dans une couette, il lit des livres, il a l'électricité et une bouilloire pour le thé. Il fait sous lui grâce à un tuyau qui est relié à un plancher technique, il a une montre au poignet pour se "réappropier l'espace et le temps". … Hahaha !!!. Le faux concept bidon ! Hilarant !!!
Goutons ce verbiage choisi et bien dosé « comme lui (l’ours) il est placé en état d’hibernation… dans cet état de somnolence propice à la distanciation et à la prise de recul »… Le mec hiberne au printemps dans un Hotel surchauffé (comme tous les bâtiments parisiens) à l’instar de l’ours qui, lui vit à poil (c’est le cas de le dire) et aime prendre de la distance, c’est bien connu, quelque soit le temps qu’il fait dehors (c’est à dire dedans puisque que quand tu vis à l’état animal, il faut bien reconnaître que le dedans et le dehors ont tendance à se confondre joyeusement !
Et ça, goutez moi ça : « Quant à l'ergonomie de l'habitacle, dont le sol est recouvert d'un fin matelas de mousse, elle a donné lieu à un mois d'essais nocturnes pour être le plus confortable possible. » Etre le plus confortable possible !!!! Ben voyons !

On pourrait disserter longtemps sur l’ennui des humains des villes qui les conduit à mettre en scène n’importe quelle supercherie rapidement brainstormée (sympathiques, certes) grosses comme eux et appareillées gentiment des cautions d’usage. La caution littéraire n’étant pas la moindre (il faut ça rive gauche). Et que je te saupoudre tout ça d’un peu de Thoreau ! On va rajouter un peu de Jules Vernes, c’est plus populaire, ça fait rêver, tout le monde connaît. On nous dit même qu’il a prévu de faire un peu « d’exercice musculaire » grâce à un système de sangles élastiques. Pour quoi faire ? Des muscles pour quoi faire quand tu vis couché avec des livres ? C’est en sortant qu’il faudra faire du stretching mon grand ou alors partir en montagne (dans les Pyrénées par exemple) mettre ton corps  à l’épreuve de la nature… la vraie.

Pierre Restany qui avait séjourné longtemps en amazonie disait des indiens que leur culture était leur sens de la nature. Ils s’y offraient nus. Nous sommes loin des méga-urbains qui s’ennuient en regardant des films qui les filment.
Nous sommes loin du radicalisme de Joseph Beuys ou de Vostell ou de Chris Burden ! Ou même de l’émission américaine « human vs nature ».

L’article du journal Le Monde vaut aussi par son vide intellectuel et son manque de recul (pour le coup) http://www.lemonde.fr/culture/article/2014/04/02/dans-la-peau-d-un-ours-pendant-treize-jours_4393594_3246.html. La journaliste a bien recopié le dossier de presse. L’avant-garde n’est pas le truc du Monde, disons le.
Enfin il y a l’inévitable « dimension chamanique ». Les mecs se prennent pour des chamanes dès qu’ils entendent leur estomac gargouiller. C’est le plus hilarant de tout l’article. « l’artiste invoque Ulysse et le cheval de Troie » nous dit Le Monde. Cheval de Troie mais pour quelle guerre  et pour quel voyage?????

Moi je trouve que, même si Abraham est un gars respectable et sûrement sincère (et sympathique, n'en doutons pas), il se trompe un peu dans l’expression de sa quête artistico naturaliste. Il ressemble à ces gens qui font du jogging au bord du périph’ ou de la gym enfermés dans des lieux clos et chers.

C’est du art washing comme il y a du greenwashing ou du socialisme washing.
C’est l’époque qui veut ça.
L’idée la plus drôle (et la plus aboutie) est que l’artiste enfermé dans sa boîboîte observe les visiteurs par le trou du cul de l’ours mort.

Poincheval en méditation

 

 

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