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L e P i x d r e a m e r
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23 mai 2011

Les petits agacements

Les fainiants du langage, les habits noirs, les bouffeurs de popcorns au cinéma, les journaux gratuits dans le métro, les bagnoles arrêtées moteur allumé, l'expression "y'a pas d'souci" et autres petits défauts et grands travers de mes contemporains.
(Deviens-je allergique à mes congénaires? Ma misanthropie a-t elle franchi un cap supplémentaire sur l'échelle de Richter? Ai-je vieilli?. Je décide de compulser un peu en dressant la liste de mes petits agacements et en invitant le(s) lecteur(s) à y déposer les siens.)

  • On le sait que chaque génération qui arrive apporte son langage, chaque vague y va de son dialecte qui lui garantira un semblant d’originalité. J’aime bien ceux qui s’alarment du danger du laisser aller et de la perte de qualité des choses et des hommes. Là où ça déconne bien en ce moment, c’est dans le langage, je veux dire la langue, sans parler de l’orthographe évidemment (voir facebook ou les commentaires sur n’importe quel forum). Ainsi de la prononciation. Exemple : deux euros, prononcer deux zeuros bien sûr (ça marche aussi avec trois). Eh bien ils n’y arrivent plus. Ils ? Mes contemporains bien sûr. On ne sait pas pourquoi, les gens ne font plus les liaisons. On entend donc : « deu euro » ou troi euro ». L’enfer des oreilles. C’est dans la continuité ordinaire de « la voiture à Michel » au lieu de « la voiture DE michel » (génitif bordel !). A un moment, j’avais remarqué que l’évitement des liaisons était très à la mode chez les gens de télée, en particulier chez canal+. Certains continuent d’ailleurs. C’est le cas d’Ali Badou au grand Journal, vous remarquerez.

  • Tous en deuil! Paris ville lumière ! certes d’accord, oui, incontestable, sublime. Heureusement que les murs sont là pour nous faire écarquiller les yeux. Le parisien, lui, a perdu de sa superbe, non ? Il est vrai que les modes vestimentaires y sont pour quelque chose. Pour les femmes, ça va encore, on peut trouver quelques couleurs dans les mailles, des accessoires originaux, voire des excentricités qui mettent en joie. A condition qu’elles y adhèrent ! Mais globalement la tenue des gens ressemble à l’état du pays qui en manque…de tenue. Le deuil a envahi les esprits, la morosité a pris le pouvoir, l’avachissement a envahi les plis. Le spectacle de ce peuple parisien est terrible. Tout le monde est en noir, en gris foncé ou au mieux en marron. Quand une tache de couleur surgit, il s’agit d’un sac en plastique, d’une écharpe, d’une paire de chaussures de sport ou d’un coup de folie. Dans le métro, c’est une horreur absolue, du noir, du noir et du noir. Filles comme garçons en pantalon sombre et délavé, pompes noires informes, blouson mal coupé noir, sac usagé déformé noir. Une horreur je vous dis ! Sans compter les encapuchonnés à dos rond en survêt noir et bonnet rond noir. L’autre jour je suis rentré dans une boutique de vêtements rue du château. C’est un manteau à fleurs pour femme qui m’y a invité. Il s’agissait d’un vaste magasin d’articles chinois, tibétains, vietnamiens, thaïlandais. C’était sublime, de la couleur partout, de la gaieté, des fleurs, des volutes, des courbes  délicates, des matières soyeuses. J’avais envie de rester boire un thé au milieu des coussins roses et que le vendeur au fort accent indien me parle de là-bas.
    En cliquant sur l'image ci-dessous, vous aurez une idée du défilé des habits noirs. Ils font la queue pour l’exposition Basquiat (le roi de la couleur). Donnez-moi des saris, du safran, des roses fuschia, des bleus de manganèse, des rouges bien carnés, des jaunes de tournesol !

les_habits_noirs_paris1

 

  • les popcorns et le 7° art. Je ne vais plus au cinéma que 4 ou 5 fois par an désormais. Je n'ai jamais été cinéphile malgré quelques passions pour Kurosawa, Leone-Morricone, les frères Coen, Sautet, Ridley Scott, Malick, Jarmush et quelques autres. Au fond je dois avouer que ça n'est pas le prix qui me rebutte le plus mais c'est cette américanisation du spectateur de base  qui, poussé par les vitrines clinquantes du guichet, confond désormais son salon avec une salle de cinéma. Les gens viennent voir un film en bouffant des popcorns par paquet de 1kg arrosés le plus souvent d'un bon soda au sucre américain. La séance est donc couverte par le bruit des mains qui empoignent les graines de maïs dans les cornets géants puis par le ruminement des spectateurs dont les mœurs se sont clairement bovinifier ces dernières années. L'idée de me retrouver au milieu de tous ces ruminants m'indispose totalement. Ça fait partie de cette tendance généralisée à la prosmiscuité : "j'ai envie de bouffe maintenant, je ne vois pas pourquoi je m'en empêcherais, j'ai bien le droit". Les français ont désormais en tout lieu toute circonstence cette conception là de la liberté. Bientôt au restaurant, ils apporteront leur lecteur dvd et ils regarderont des films. Au font ils doivent s'imaginer devant leur télé en permanence. On retrouvera peut-être bientôt ce phénomène au théâtre bien que ce soit là un bastion culturel de vrais résistants souvent.
  • Les journaux gratuits distribués par des gens souspayés à l’entrée du métro parisien n’incitent manifestement ni au respect de l’environnement, ni véritablement à la lecture. Le spectacle des gens lisant quasiment tous le même journal est un spectacle pré-orwellien assez inquiétant. Pendant ce temps-là la grande presse écrite traditionnelle, celle qui pousse à la réflexion personnelle ou à l’investigation permanente se meurt tranquillement. De moins en moins de lecteurs du Monde, de Libé et autres dans le Trom… La coutume hypocrite, et un peu lâche il faut bien le dire, qui s’est instaurée dans le métro parisien, consiste à « lire » le gratuit (5minutes suffisent) et à l’abandonner délicatement sur le siège. En fin de journée les wagons de métro sont des poubelles géantes parcourues de feuilles de journaux ineptes qui tapissent les sièges, recouvrent le sol et se mêlent aux miasmes surpuissants des migrations laborieuses quotidiennes. L’autre jour je me suis permis de le faire remarquer à un homme. J’étais plongé dans une bio de Galillée sur la ligne Nation-Porte Dauphine. La rame était relativement pleine. Sur le groupe de banquettes de quatre places à côté du mien, trois personnes dont un homme qui vient d’arriver et lit un de ces torchons orwelliens gratuits. 2 ou 3 minutes plus tard, sa lecture est finie, il pose soigneusement son « journal » sur la place encore inoccupée en face de lui. Je sens son geste et relève la tête en jetant un premier regard sur sa main posant le canard puis je relève la tête sur lui. Il remarque le mécanisme volontaire de mon mouvement de tête et croise mon regard. Je lui dis qu’il y a des poubelles partout dans le métro. Il me répond avec une fausse innocence que «  c’est pas pour le jeter mais pour le donner à un éventuel lecteur … ». Je lui rétorque que c’est en se débarrassant hypocritement comme cela que les rames de métros sont des poubelles géantes en fin de journée. Dans la seconde une jeune femme vient s’asseoir, retire le journal en le pinçant des doigts et le glisse entre elle et son voisin. J’ai repris ma lecture. Quelques instants plus tard, la jeune fille se lève, dans le mouvement l’homme reprend le journal-torchon, le met dans son cartable, en se disant qu’il le jettera plus tard. Galillée vient de rentrer à l’école de mathématiques de Padoue.
  • à Paris, on trouve tous les 300 mètres (en moyenne) un automobiliste à l'arrêt moteur allumé. Il attend. Il attend quelqu'un. Il téléphone. Il fume. Il écoute la radio. Il prend l'air conditionné. Il bavarde. Il trie des papiers. Il n'a pas entendu parler du réchauffement climatique, de l'excès de CO2, de la couche d'Ozone. Il ne fait pas le lien entre la catastrophe écologique qu'il contemple à la télévision chaque jour et le ronronnement pépère de son moteur à l'arrêt. Le gaz qui s'échappe de sa voiture n'a aucun rapport avec le monde qui l'environne. Il est de tous les âges, de toute confession, de toute condition. La vie des bêtes l'émeut.
  • "y'a pas d'souci". Voilà l'infernal gimmick qui a remplacé le "y'a pas de problème" que j'avais toujours connu. Cette expression en apparence désuette a envahi les interstices du français dialectal qui se répand dans les bouches humaines. Nous sommes au comble de l'hypocrisie. Derrière cette mièvrerie sonore, se cache souvent une inadaptation caractérisée à la situation dans laquelle elle s'inscrit. En fait elle cache une allergie à fleur de peau et une menace latente d'énervement. Elle veut signifier "voyez, je vais faire ce que vous me demandez mais n'allez pas me créer des soucis car je n'ai pas de soucis, je n'aime pas avoir des soucis, je ne veux pas de soucis". Elle se veut exclamative et prévenante à la fois, dénuée de toute menace mais sur le qui-vive. C'est une sorte de formule de politesse forcée à l'heure où la politesse élémentaire a quasi disparue des mœurs urbaines. Je regrette le "y'a pas de problème" qui avait le mérite d'être franc, d'annoncer la couleur. Un problème on sait ce que c'est. Un souci, ça sent l'inquiétude à deux balles et le sourcil froncé, ça relève de la sphère de l'intime. Sa sonorité est une sorte de grimace du langage, de figure de la mièvrerie. Les autres tics langagiers en cours qui contribuent à l'appauvrissement généralisé de la langue française sont : "voilà" (qui comme vous l'aurez remarqué fait aujourd'hui office à la fois de verbe, d'adjectif, de complément d'objet direct), "on va dire" qui a remplacé il y a quelques années le "disons" mais qui tend cependant à disparaitre et enfin , sans jeu de mot, "au final" qui a remplacé "finalement". Au final de quoi? On se demande. Il faut remarquer que ces termes et le ton qui va avec sont rabachés systématiquement par les gens dont le "parler" est le métier et qui seraient théoriquement dans l'obligation d'une exigence littéraire, je veux parler des journalistes (ou pire, des animateurs) TV et radios qui, pour le coup, ont inventé une aberration majeure de leur expression; le "hein" glissé au milieu d'une phrase et qui, lui, fait office de virgule. Une horreur absolue que tous reprennent en cœur. Le degré zéro de l'expression.
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Commentaires
C
Côté litérature, j'ai toujours adoré les San A. Une verve à part<br /> Mais quand j'entend mon junior causer "collège", j'en ai la grammaire qui me fait mal : ça écorche allègrement les phrases, modèle sms. Il n'y a plus de syntaxe, où sont passés les sujet-verbe-complément???<br /> C'est mode ! Bof, ohne mich !
D
Bien d'accord avec toi!<br /> J'ai les mmes enragements... les pop corn qui agressent écoute et odorat en laissant derriére un sol jonché de ce qui a été recraché ss aucun respect!!!Tout le reste aussi! Mais alors le pays des ruminants les plus hallucinants est bien le métro, concentré de tout ce qui provoque chez moi une overdose urbaine.Macheurs de chewing gum, mp3 sur les oreilles et un livre ou un gratuit à la main.Plus de regards,de rencontres...Quel ennuie!<br /> Et les bons coups de foudre on les a où?Les petits trajets sympathiques et sans concéquences parfois aussi croustillants que des brèves de comptoir.Je dois me faire vieille puisque je dis "Avant"...J'avais horreur du métro mais quand je le prenais je m'amusais à observer, écouter, échanger regards, sourires, paroles...Tjs peut etre une surprise?!Dailleurs j'y ai fait des rencontres importantes.Maintenant je sais ce qui m'attends ça casse un peu l'ambiance et la motivation... Alors à vous tous qui devez vous engloutir dans ce lieu de perdition... Courage!...<br /> En tous cas je me suis bien amusée à te lire...
L e P i x d r e a m e r
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