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L e P i x d r e a m e r

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Derniers commentaires
28 septembre 2021

"EN MODE SOUCI" de l'humour pas comme les autres.

"EN MODE SOUCI" de l'humour pas comme les autres.
Je viens de voir « En mode souci », le nouveau spectacle de Philippe Fertray, un florilège composé principalement de sketchs de « Pas d’souci ? » et de « En mode projet ». D’où le titre simple et direct. Premier clin d’œil pour les initiés.Florilège est...
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7 juillet 2018

COMMENT COMMENTER LE FOOTBALL?

COMMENT COMMENTER LE FOOTBALL?
Le football est un des sports les plus archaïques qui existe pour deux raisons : son principe de jeu est d’une simplicité extrême et les règles qui le régissent n’ont quasiment pas évolué depuis son origine. Pour autant, on peut affirmer tout de même...
16 novembre 2017

EPIDEMIE D'HUMORISTES

EPIDEMIE D'HUMORISTES
D'une façon générale, on peut dire que nous sommes dans une période d'inflation dans tous les domaines. En tous cas dans notre société hypercapitaliste, la surabondance règne, la surenchère est la règle, l'excès fait loi. C'est la crise, parait-il (il...
19 juin 2017

HERVE FISCHER AU CENTRE GEORGE POMPIDOU

HERVE FISCHER AU CENTRE GEORGE POMPIDOU
C'est un grand jour. Mon ami Hervé Fischer expose à Beaubourg. cela veut dire quoi? Que l'Everest est atteint. J'en conçois une émotion particulière parce qu'avant d'être mon ami, il fut mon professeur de philosophie de l'art en deuxième année des Arts-décoratifs...
19 novembre 2016

JE SUIS UNE VIEILLE DAME

JE SUIS UNE VIEILLE DAME
Cela fait longtemps que je vais voir de la peinture dans les musées, dans les galeries, dans les fondations. Je me suis toujours intéressé à la peinture. Mes premières visites au Louvre ou au Prado remontent à l’enfance. Ce qui m’a toujours intrigué dans...
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7 janvier 2018

TOUJOURS CHARLIE

Trois ans après les attentats des barbares islamistes, la branche armée de la religion musulmane, les médias posent la question de savoir si la France est « toujours Charlie ». Outre l’absurdité consistant à savoir qu’est ce que « la France », « l’opinion publique » et tout ce genre d’abstractions, on a l’impression que s’il n’y a pas de manifestation tous les jours avec 4 millions de personnes, cela signifie que nous ne sommes plus Charlie. On a même l’impression qu’ils en rêvent, qu’ils aimeraient que se soit  désagrégée la solidarité laïque, le ras-le-bol du religieux, la quête démocratique, l’héritage humaniste qui fait le socle de l’utopie révolutionnaire de 1789 et de la Commune de Paris. IMG_3253

 

Bah non… On est TOUJOURS CHARLIE, les gars. Désolé.

Ça veut dire quoi ? Que l’on est pour l’éloignement du fait religieux (et de son cortège de pensées magiques et d’arrières mondes douteux) de la vie politique. Cela signifie que l’on refuse la pensée unique des monothéismes et de leurs psychorigidités communautaristes. Cela signifie que partout où l’on est il faut répondre pied à pied, mot pour mot, à l’infiltration grossière et sectaire des nouvelles formes de religion, les évangélistes et leur pseudo-modernité, les sionistes et leur intégrisme paranoïaque, les islamistes et leur lecture approximative du coran. De tout temps, les monothéismes  sont les 3 grands fléaux de la pensée. Il faut que leurs caciques comprennent que la république démocratique et citoyenne ne croit plus en dieu mais dans l’homme et dans la femme. Etre Charlie c’est aussi ‘accorder sa confiance à aucun prophète, ni d’ici, ni d’ailleurs. C’est ériger le scepticisme scientifique, celui basé sur le doute et la gnose comme gouvernail philosophique. Les valeurs républicaines, même inachevées, même imparfaites, ne sont pas négociables.

J’observe les cérémonies du 7 janvier 2018. Je vois le président de la république serrer dans ses bras les parents de Ahmed Merabet. Je vois Riss se recueillir devant le lieu du massacre. Je vois des gardes du corps regarder en l’air au cas où un crétin décérébré voudrait jouer au war game. Je vois des politiques et des institutionnels ensemble. Les commentateurs sur les plateaux vont bon train. Tiens, je ne vois aucun représentant de la religion musulmane ?… J’espère que je me trompe.

Plein de gens aimeraient nous faire croire que la France est un pays raciste. Non, la France n’est pas un pays raciste. Le communautarisme, en revanche, provoque, à n’en pas douter, un retour de réflexes xénophobes que le folklore religieux vient exacerber.

IMG_3367

Etre Charlie, cela signifie affirmer en tous lieux qu’ici on a le droit d’avoir une pensée individuelle, libre de blasphémer, de critiquer, de ne pas croire en dieu, de se moquer, de caricaturer, de dire des gros mots, de s’habiller dévêtu si on se sent mieux comme cela, de boire, de fumer,  de faire du rock, du rap, de la musique symphonique, du sport mixte, de la danse dans les rues,  des clips multi raciaux, de prendre soin des animaux, de faire du bio pour lutter contre les empoisonneurs industriels, de défendre les petites librairies de quartier, de boycotter amazon, de se déplacer à bicyclette à chaque fois que c’est possible, de ne pas croire au sacré mais de respecter l’Histoire, de lutter pour l’égalité des femmes et des hommes, de créer des écoles, des crèches et des maisons de la culture partout pour éviter que les bondieuseries incultes s’y infiltrent,  de refuser que des attardés nous fassent pédaler en arrière.

CECI EST NON NEGOCIABLE.

IMG_3041ez mon imprimeur du XVIIIème arrondissement de Paris

 

14 septembre 2016

FESTIVAL D'AVIGNON 2016 ou la démocratie créative

FESTIVAL D'AVIGNON 2016 ou la démocratie créative
Je suis allé au festival d’Avignon cet été. Je n’y avais pas mis les pieds depuis 1984 (soit32 ans…). Cette année là nous avions fait un happening sociologique avec moncompère Federico Garcia-Mochales qui s’appelait "Connu, Inconnu. Vous voulez être connu,...
19 juin 2016

LE PROLO BASHING

LE PROLO BASHING
Elle est impressionnante cette France qui va lentement (quoique) mais surement vers le totalitarisme postmoderne et High-tech. On voit évidemment les idées du Front National, fondé par les nostalgiques des croix de Feu, du pétainisme couard et des sympathisants...
25 avril 2016

ENCORE EUX, TOUJOURS EUX

bougies

C’est dingue ! Depuis les attentats du 11 septembre 2001, on ne parle que d’eux.
ON, ce sont les médias, les intellectuels, les politiques aussi évidemment.
EUX, ce
sont les islamistes et leur cortège d’avatars, de courants, de haine, de complexes, de pétrodollars et de banlieusards désœuvrés.
A la vue des ruines et des taches de sang
provoqués par leurs petits soldats névropathes, on hésite entre l’auto flagellation à la française et le vatenguerrisme technologique. L’islamisme, c’est à dire la version extrémiste de la religion musulmane, a replacé la religion au centre des débats alors
même que nous avions eu la sagesse de l’écarter des décisions du pouvoir (la loi de 1905 su la laIcité). Depuis un siècle, la question de dieu et de ses quatre volontés était sortie de nos préoccupations quotidiennes. Nous n’avions plus qu’à nous préoccuper de nous, le peuple, l’individu, le corps social, l’éducation, la solidarité sociale, la quête du bonheur comme utopie révolutionnaire hugolienne, le progrès,
l‘émancipation des femmes, l’accès au savoir pour tous, l’échange par l’art et la liberté d’expression, le refus de la pensée magique et des fables manipulatrices par l’athéisme, la gnose ou l’hypothèse scientifique. Au lieu de cela, la religion la plus attardée de la planète, l’islam (qui signifie : celui qui est en paix et qui est soumis) déboule avec sous le bras (armé) des textes xénophobes, des sourats remplies d’exhortations à la peur, une tendance prosélyte séculaire, une conception de lafamille, de la femme et de l’homme qui n’a plus cours ici depuis plusieurs décennies et une allergie congénitale au progrès et à la science. Nous allons devoir remettre en place ces nouveaux curés, les imams et leurs affidés, de la même façon que nous avons écarté les curés chrétiens des voies de la république. Les plus prudes d’entre nous refusent toujours de croire aux conflits de civilisation très bien décrit par Huntington entre l’occident et le monde arabe (ou entre le monde arabe et le reste du monde plus précisément …). Les images ne leurs suffisent pas, les systèmes sociaux, les raisonnements claniques, les rigidités historiques, les souffrances des intelligentsias, la conditions des femmes de toute la région panarabique… Ceux qui pensent que refuser les outrances de cette civilisation n’est rien d’autre que de l’islamophobie, oublient que nous le faisons au nom de l’idéal démocratique et républicain qui est un work in progress exigeant, quotidien et qui
ne saurait être entravé par des esprits qui pédalent en arrière.

Hors donc, on demande et redemande aux imams autoproclamés ce qu’il y a vraiment dans le coran. S’il y est vraiment écrit qu’on a le droit de lapider les femmes, de fouetter à mort des contestataires, de couper la main des voleurs, de n’autoriser aucun droit aux femmes que celui de se cacher sous des tissus, de traiter les non musulmans en mécréant. Des milliers d’heures médiatiques et de kilomètres de journaux sont consacrés aux musulmans, à leurs états d’âmes, à l’ennui vécuspar la troisième génération de fils d’immigrés en Europe, à leurs tendances violentes. Ces mêmes imams, s’ils ne prêchent pour la plupart pas la guerre (dite) sainte ("guerre sainte" est un oxymore), ne leur bourre pas moins le mou de concepts dépassés et puérils tels que le paradis et l‘enfer, la parole divine, la soumission et la crainte d’un dieu supposé. Les paroles de Tareq Oubrou, le « grand » imam de
Bordeaux sont assez éloquentes dans le monde du 26 mars dernier. Il parvient à tricoter un concept « l’ijtihad » afin de lutter contre « la tentation de céder à la paresse qui consiste à essentialiser les religions (les, pas LA), « chasser les préjugés et les idées toutes faites ». Les curés ont toujours eu l’art d’inverser les rôles. Alors que ce sont eux qui définissent le monde par des idées toutes faites et sans nuances, ils en accusent ceux qui restent éveillés et les empêchent de vendre leur sable. Les chrétiens, las de se voir reprochés leurs passé sanguinaire et génocidaire, avaient réussi ce tour de force dialectique dans les années 80 de renouveler leur rhétorique idolâtre en troquant le débat sur la violence exercées par les clergés sur les masses, par la promotion d’un rapport personnel à dieu (ou a son fils comme on veut) comme socle unique de la foi. Ça évite de faire le procès du passé, de la pédophilie, de l’abrutissement des peuples sous le joug d’une explication du monde sans nuances et sans fondement. Les musulmans modérés font pareil. C’est fin comme du gros sel comme disait ma grand-mère. L’imam de Bordeaux veut « résister en diffusant une lecture de l’islam appropriée à notre époque » et concède que la lecture religieuse « était peut-être valable au moyen-âge »…
Diffusez, diffusez, il
en restera toujours quelque chose. Ils sont malins. Mine de rien il fait porter le chapeau à l’occident. Ecoutez ça : « le terrorisme est le produit de notre postmodernité caractérisée par la technique dans une main et l’émotion dans l‘autre. Le terrorisme consacre la défaite de la raison ». Toujours malin. Autrement dit. Nous aurions perdu. Le terrorisme nous informerait « sur nos propres dysfonctionnements ». Ben voyons ! A aucun moment il n’est question des dysfonctionnements outrageux des sociétés musulmanes !!! C’est dingue. En réalité le terrorisme islamiste consacre l’échec de la pensée musulmane et des sociétés qui ont adopté cette religion.

Il en va de même à propos de la crise des migrants. Contrairement à ce que disent les commentateurs, il ne s’agit pas d’une crise européenne mais d’une crise arabe !!!!??? Hé les mecs vous avez une poutre dans l’œil ! Ce sont des sociétés musulmanes totalitaires qu’affluent des millions de migrants. C’est de la crise de ces sociétés là et de leur délitement qu’il s’agit. C’est ici qu’ils viennent se réfugier. D’ici personne ne fuit pour aller se réfugier en Lybie, en Egypte, au Yémen ou en Tunisie…

Voilà où nous en sommes, à devoir supporter leur omniprésence dans les débats, sur les ondes, dans les journaux, sur les plateaux télé. Ils ne lâchent plus le micro. Ils occupent le champ médiatique mais aussi l’espace des consciences collectives. On ne parle que d’eux, de leur dieu, de leur prophète, de la foi religieuse, de l’islam, des musulmans, de leur voile, de leurs terroristes, de leur texte. Qui l’eut cru ? Qu’on nous construirait ici de nouveaux temples religieux ? Que les gens se remettraient à se prosterner devant des dieux qui brillent par leur absence ? Le retour de tous ces peuples réactionnaires aux religions stériles et totalitaires a bel et bien mis fin à nos 20 ans. L’athéisme va devoir inventer une forme de militantisme.

Il y a une urgence de résistance active.

18 novembre 2015

Le retour du religieux est une catastrophe

Le retour du religieux est une catastrophe
Le retour du religieux (et du fait qui va avec) est une véritable catastrophe pour l’humanité comme l’ont été les choix énergétiques opérés par le capitalisme globalisé et le réchauffement climatique qui en est la conséquence. Une catastrophe. La religion...
11 janvier 2015

POUR CHARLIE CONTRE LES BARBARES RELIGIEUX

POUR CHARLIE CONTRE LES BARBARES RELIGIEUX
24 septembre 2014

LE GRAND DANIEL ARASSE

Nous sommes en 1977, libéré du lycée, du Bac et des angoisses qui vont avec, je décide de m’inscrire à l’université de Tolbiac en Histoire de l’art. J’ai lu/vu quelques livres sur Michel-Ange ou Vinci, j’ai vu Goya, Bosch et Velasquez au Prado, j’ai vu...
3 avril 2014

"Dans le peau de l'ours"

"Dans le peau de l'ours"
Le monde de la performance artistique a toujours charrié du boire et du manger. Comme tous les mouvements artistiques, me direz-vous ? Il convient donc toujours d’être vigilant, en particulier dans cette époque de grand mélange médiatique ou le vrai du...
26 janvier 2013

LES MARINS NE SONT PLUS CE QU’ILS ETAIENT, LA MER NON PLUS

Assis sur un rocher ou prospère une colonie de moules bien grasses, Christophe Colomb observe le soleil se coucher à l’horizon de la mer océane. Il sait que l’on peut rejoindre les Indes par le couchant, il brule d’envie de prendre le large pour savoir. Il relis les cartes de toutes les époques, des plus antiques, les grecques avec Ptolémée, les phéniciens qui longèrent la côte africaine, les récits des hommes du nord qui posèrent le pied sur une Terre Neuve où vivaient des indiens Beotuks avec lesquels ils se croisèrent au IXème siècle, les arabes qui tracèrent les cartes de l’Afrique orientale, les égyptiens qui pressentaient que le dessin des astres dessinait de larges routes. Tout lui parait cohérent. Il y a forcément une route au couchant. Déjà de nombreux portugais s’étaient aventurés découvrant les iles du Cap Vert, puis bientôt le Cap Tormentoso (le cap de Bonne espérance) et la remontée de la cote orientale de l’Afrique, puis les Indes, les iles Moluques d’où l’on ramène les épices souvent au prix de batailles contre les navires musulmans (arrivés avant) ou bien contre les populations hostiles de certains archipels. Les marins de ces temps-là venaient de tout le pourtour méditerranéen. C’étaient des hommes rudes et pauvres. Les conditions de vie à bord étaient d’une grande précarité et les règles sociales très strictes. On ne savait pas quand on revenait et si l’on revenait, et dans quel état. A bord du bateau, on entendait parler toutes les langues. Les portugais furent sans doute ceux qui organisèrent le mieux les routes commerciales et militaires entre leur cote atlantique et les Indes en passant par Madagascar, les iles Moluques et les Philippines. Il suffit de dénombrer tous les forts portugais qui balisent le pourtour africain et le golfe persique. Quand ils ne pouvaient pas accoster comme à Cipangu (le Jap on)par exemple, ils jetaient des bibles à la mer dans l’espoir qu’elles seraient récupérées (et lues !) par les indigènes. Il ne faut pas oublier que l’ethnocentrisme (expansionniste) catholique européen avait pris soin par une bulle papale de diviser à l’avance le monde en deux, moitié pour les espagnols, moitié pour les portugais. Pendant un siècle à peu près, les expéditions vers les Terrae Novae s’enchainaient sous les bons hospices de la casa de Contratacion qui accordait ses crédits aux projets qui lui paraissaient solides (et crédibles) au nom de la couronne d’Espagne.

Les marins qu’ils soient matelots, capitaine ou pilote, prenaient énormément de notes, dessinaient, collectaient sans cesse. Leurs journaux de bord relataient avec précision les faits et gestes de leur équipage. Ces journaux sont aujourd’hui des témoignages précieusement conservés dans les Archives de Séville, Salamanca, Londres ou Istamboul. L’épopée de Magellan (Hernando Maghalanes) est d’une dimension épique incroyable. Il est marin, il fait ses classes comme simple matelot au sein de plusieurs expéditions militaires (et commerciales) portugaises jusqu’en Inde et aux fameuses Moluques d’où l’on rapporte le gingembre, le poivre, le curry pour donner comme par miracle du gout à la cuisine européenne. Ces opérations ne se font pas sans violence tant vis à vis de certaines populations locales que vis à vis des navires arabes qui voient évidemment d’un assez mauvais œil les tendances expansionnistes des chrétiens. Magellan s’endurcit donc pendant des manœuvres difficiles ou des comités d’accueil hostiles à la vénalité affichée des commerçants chrétiens. Les années font de lui un marin expérimenté et précis. Lui aussi écoute les récits des pilotes de navire, étudie les cartes et pressent qu’une route au sud ouest existe pour rejoindre les Indes et l’empire du grand Khan (la Chine). Il parvient au prix d’une infatigable opiniâtreté à se faire financer son aventure par la cour d’Espagne (nul n’est prophète en son pays). Il arme 5 navires bourrés d’Espagnols qui ne le portent pas dans leurs cœurs (rivalité oblige). L’ironie de l’Histoire est qu’il ne finira pas son tour du monde car il fut assassiné dans une petite île de l’archipel des Moluques au cours d’une négociation avec un petit roi qui ne voyait pas d’un bon œil l’arrivée de ces étrangers suréquipés et trop curieux. Celui qui fur le premier homme à faire le tour du monde fur son esclave, Henrique. Il n’est pas dans les livres d’histoire.

Nous sommes en 2013, les médias annoncent l’arrivée des marins du Vendée Globe. La misère de l’événement est à son paroxysme. Elle s’apparente à l’ennui mortel (et mortifère) des retransmissions de sports polluants (F1, moto,…). Les médias n’annoncent que des chiffres : le temps qu’ils ont mis, la météo, la taille des creux de vague, le nombre de spectateurs présents sur la digue, le précédent « record », le classement et la joie supposée des retrouvailles familiales (ce sera le seul moment d’émotion ( ils sont allés vite donc ils sont des héros). Les images retransmises pendant la course ont, comme d’habitude, été consternantes ; un marin hirsute, fatigué et trempé en premier plan, derrière lui une forte houle soit grise soit bleue, en fonction du temps, et des autocollants partout arborant la marque du sponsor (l’emplacement des autocollants est calculé à l’avance en fonction des angles de caméras embarquées sur le bateau). Je suis content que mes cotisations à la Macif aient permis à un désœuvré d’aller passer deux mois de vacances en mer. J’aurais préféré que la Macif garde le pognon pour me rembourser mes dents. Comble de la misère chiffrée des distractions contemporaines, ledit marin précise dans un bref interview radiophonique qu’il « gère » son arrivée (et son classement). Voilà, ils vont arriver les uns après les autres et comme d’habitude, ils n’auront rien à dire sur la mer, les animaux, l’état des océans. Ne vous attendez pas à de l’épique, ils n’en sont pas équipés. Ils ne vous diront rien sur le péril écologique qui pourrit les océans, les tonnes de plastiques et de déchets qui y flottent et qui asphyxient les organismes vivants qui disparaissent pendant qu'ils battent leurs records à la con. Ils n’auront rien appris sur le monde et ne vous rapporteront rien! Pas un récit, pas une découverte, pas une vision. Ils n’ont d'autre quête que celle de « dépasser » leurs p… de « limites ». Ils referont leur sempiternel éloge de la vitesse, à la seconde près. La misère, quoi.

Magellan, reviens !! Rendez-nous Vasco de Gama, Vespucci, Cabot, Pinzon, de Monfreid, Cendrars, Charcot… Et Henrique!
DES MECS QUI AVAIENT DES YEUX, UN ESPRIT ET DES CHOSES A DIRE !!!!!!

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Maman, les p'tits bateaux

12 janvier 2013

Bienvenue

Ils s'évertuaient à essayer de trouver leur place dans le monde réel, à se frayer un chemin dans la bousculade. La contamination gagnait tellement de terrain qu'ils inventèrent des mondes virtuels tout en image à base de pixels. Pixdreamers, il embarquèrent pour le Pixdream, désincarnés mais heureux.

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Les publicités figurant en bas des articles ne relèvent pas de mon choix.

Elles sont imposées par cette plateforme et lui permettent d'être gratuite. 

 

 

 

 

12 janvier 2013

DEAMBULATION PARISIENNE

Il y des instants de bonheur. Descendre d’un bus sous une pluie molle, anormalement pénétrante et hypocrite dans ses intentions, pour se rendre à un rendez-vous dont on n’attend rien. Se dire que la soi-disant ville lumière n’est pas infaillible et, qu’elle aussi marque des instants de faiblesse et des concessions au ciel qui sont d’une facture douteuse. En vouloir aux Gaulois puis à leurs colons Romains d’avoir établi la capitale de ce pays dans un bassin qui prend aussi facilement l’eau et retient sans résister des cumulo-nimbus patauds, fainéants et manquant à l’évidence d’exercice. Marcher très lentement, voire à reculons, ralentir peu à peu et s’attarder devant les vitrines des « beaux magasins ». Dans ces moments de déshérence, et histoire d'occuper mon esprit, je me pose souvent la question de savoir à quoi sert l’art. Brutalement, spontanément, on aurait tendance à répondre que ça ne sert à rien. C’est bien pour ça que l’art est intéressant. Il est intéressant parce qu’il serait inutile, pas franchement essentiel à la marche du monde où à la guerre contre la pauvreté par exemple. La peinture, a fortiori, n’aurait pas de fonction première bien déterminée, elle satisferait les marchands au mépris du bon peuple qui préfèrerait se consacrer à la mécanique, à la comptabilité ou au sport.

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Eugène Boudin. Deauville à marée basse. Huile sur toile. 1865

Dérivant tristement sur ce trottoir bordé de salons de coiffure, de banques, de magasins d’électroménager, de fleuristes et de cuisine rapide fortement chargée en huile de palme, je m’arrête d’un coup devant une vitrine mal éclairée. Un petit tableau d'une quarantaine de centimètres repose seul au centre. Un rideau rougeâtre délavé le sépare de l’arrière boutique. Il a l’air d’un chiot à vendre qui attend son maitre au milieu de la sciure. Je m’approche. On y voit trois voiliers évoluant sur une mer gris bleu qu’un ciel manganèse chapeaute lourdement. La légende indique qu’il s’agit d’une traversée entre Honfleur et Le Havre de Eugène Boudin. Cette belle trinité, le ciel, la mer (la terre d’où part le regard du peintre-spectateur), les 3 voiliers, sont entourés d’un cadre épais qui les mange un peu sans altérer toutefois la fraicheur bleue qui s’en dégage. Je me mets bien en face, je me penche, je le scrute. Il n’y a pas grand-chose, de larges coups de brosse, des voiles à peine blanches, une mer qui ne prétend même pas à la fluidité pour prétendre être la mer. Les voiliers ont l’air d’aller bon train. Ils sont surement barrés par des amis qui se font des signes entre deux embruns. Ce doit être le matin. On sent que la lumière opaline des petits matins de la cote normande n’a pas encore donné tout son volume. On devine qu’il s’agit d’une croisière joyeuse, sans autre but que celui de jouer. Cette petite lucarne bleue et or éclaire mon bout de trottoir. Je me dis que la personne qui a mis ce tableau dans cette vitrine ne peut pas être un mauvais bougre, je veux dire, un type uniquement intéressé par le prix qu’il en tirera. Je me dis que Boudin, le jour où il a peint cela, ne savait pas qu’il éclairerait ma journée, que les embruns qui viendraient fouetter mon visage ce jour-là donneraient à la pluie de novembre un parfum iodé que seules des vacances sont capables d’offrir. Je me dis que Boudin, ce jour là, avait bien fait de regarder vers la mer et d’y attraper ces trois bateaux, que ce ciel bleu était unique, qu’avec cette houle me revenaient des souvenirs de Granville, que le rideau remplissait bien son office en laissant jouer toute la lumière du tableau ?

L’autre jour je suis passé devant un pissenlit qui poussait solidement entre le bas d’un mur et le trottoir de goudron. Il était accompagné de quelques brins d’herbe. Je me suis dit que la résistance s’organisait en souterrain parmi les plantes vertes et que, bientôt, elles nous remettraient à notre place. Tout en admirant leur audace et leur ténacité, je me convainc qu’on ne méritait pas mieux. J’observe le même phénomène entre les pavés centenaires de ma rue en priant pour que l’herbe repousse avec suffisamment de vigueur qu’elle vienne recouvrir les immondices de la civilisation urbaine dont je suis le collabo. Ce matin j’ai retrouvé 20€uros dans la poche d’un pantalon que je n’avais pas porté depuis longtemps. L’autre jour, alors que le métro venait de redémarrer de la station Philippe Auguste, un jeune type vint s’assoir devant moi, le nez plongé dans une biographie de Nicolas de Staël écrite par Laurent Greislamer. Enchanté d’avoir un voisin sensible, j’interromps sa lecture par un « ah ! Vous être en train de vivre un moment formidable ! Vous vous éclatez, en fait. Quelle vie incroyable, non ? Quel parcours, vous ne trouvez pas ? Et en plus c’est bien écrit, hein ? » A mon sourire béat, le type, n’a même pas le temps de s’inquiéter du fait qu’un inconnu lui adresse la parole. Il réalise qu’il n’y a pas que les schizophrènes qui s’expriment et nous devisons tranquillement sur le grand prince russe. De Staêl échange nos téléphones. En traversant Paris en vélib, toujours sous cette pluie de bassin, empruntant la rue des francbourgeois, je devine un passage qui relie le boulevard de Strasbourg. La porte cochère est ouverte, je m’y introduis, je marche le vélo à la main entre des petites boutiques colorées et tranquilles. Ca sent le travail manuel et l’ouvrage bien fait. C’est le passage de l’Ancre. Il ne demande rien à personne.  Je le traverse sur la pointe des pieds. Je passe rue des archives chez Raimo déguster une gaufre liégeoise. Les petits bonheurs s’additionnent innocemment. J’ai trouvé une réponse à l’inutilité supposée de l’art, j’ai découvert un passage étroit qui mène à la tranquillité. Elle est bordée de couleurs vives. La résistance continue.

PS : quelques temps plus tard, je suis repassé devant la galerie au rideau rouge, il y avait un tableau d’Evariste Vital Luminais, un charpentier entrain de tailler une poutre énorme dans une perspective frontale très audacieuse. J’aurais eu du pognon… ce galeriste n’est décidément pas un mauvais bougre. Je pense même qu’il veut sauver l’humanité.

21 septembre 2012

LES PETITS FOURS

 

 

 

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Quand nous vivions à l’étranger, nous évoluions dans une sorte d’espace artificiel, un entre deux mondes où la sensation de flottement était assez agréable. Notre lieu d’origine devenait un souvenir sur lequel s’agrégeait un brin de nostalgie comme une médaille à une boutonnière. Notre nouveau port d’attache nous paraissait parfait parce qu’enrobé du prestige de la nouveauté et de l’exotisme. Au Costa Rica, la vie fut assez idéale malgré la bi-saisonnalité à tendance majoritairement pluvieuse ce de petit pays (dont une légende populaire raconte qu’il fut le premier à déclarer la guerre à Hitler qui, après avoir chasser une crotte de mouche sur sa carte d’état major découvrit le contour microscopique de ce pays volcanique et tropicale au beau milieu de l’isthme panaméen). Mon père travaillait beaucoup à San José, à Cartago en passant par Puerto Limon tout en faisant des expéditions en aéroplane au Honduras, au Panama ou au Salvador pour les besoins d’une compagnie française de téléphonie. Maman nous élevait et faisait en sorte que nous remplissions nos devoirs par correspondance que des professeurs anonymes nous corrigeaient dans une lointaine campagne française. C’est dans cette douceur de vivre que j’étais tranquillement en train de rater mon Ce2 tout en découvrant l’ivresse du dessin inspiré par les charrettes multicolores des paysans costariciens marchands des deux saisons. Nos distractions étaient nombreuses et nos amis venaient de tous les pays. Notre terrain de jeu était de l’autre côté de la voie ferrée au milieu des bananeraies et des caféiers. Mes parents aussi avaient une vie sociale assez intéressante, apparemment plus riche que dans leur hlm de la banlieue sud de Paris. Ce qui excitait le plus maman c’était les soirées à l’Ambassade de France. Elle se faisait, pour cette occasion ô combien mondaine, tailler une robe sur mesure chez une couturière du quartier. Cette coquetterie suprême passait par plusieurs étapes bien ordonnées ; l’achat d’un tissu original sur les marchés locaux, le dessin du patron qu’elle glanait dans la revue modes&travaux qu’elle recevait de France, puis la mise en œuvre chez la couturière à laquelle elle parvenait à expliquer dans un frangnol soigné les détails subtils qui feraient l’originalité de sa future tenue. S’ensuivaient plusieurs séances d’essayage avant l’entière satisfaction de la « señora ». Souvent l’addition de l’exigence de la cliente avec le savoir-faire serviable de la fabricante servait une petite innovation non prévue au départ telle que une petite pochette de soirée ou une ceinture ou bien encore un châle assortis au tissu de la robe.

Sûre d’elle, Maman partait à la soirée de l’ambassadeur au bras d’un mari qui, serré dans son pantalon feu de plancher et sa veste cintrée, ne cachait pas une certaine fierté. Maman nous promettait toujours de rapporter quelque chose. Le quelque chose était invariablement des petits fours que nous découvrions le lendemain sur la table du petit déjeuner. Maman nous les offrait comme une prise de guerre en nous racontant les stratagèmes par lesquels elle avait été obligée de passer au grand dam de mon père. La pochette de soirée avait essentiellement servi à dissimuler les denrées pendant toute la soirée. Nous les goutions comme des mets exceptionnels et rares qu’on ne trouve que dans les hautes sphères de la société où se croisent des gens en grande tenue, chics, riches et importants. Nous nous faisions ainsi une idée des us et coutumes des gens qui ont la belle vie et qui à chaque repas dégustent les choses les plus rares, les mets les plus fins. Et, de fait, au palais, c’était fin. Il fallait ingérer les petites bouchées le plus lentement possible, en savourer toute la profondeur en fermant les yeux pour se pénétrer le plus sûrement possible de l’éventail complet de saveurs qui se déployaient soudain. C’était comme un feu d’artifice buccale, une gentille explosion de douceur qui devait se mériter.

La présence des petits fours dans la maison constituait une sorte de mini Noël. Nous en étions conscients. Maman nous le présentait bien comme cela et insistait chaque fois sur le caractère exceptionnel et rare d’une telle prise. Une fois les petits fours avalés, nous retournions à la banalité de nos repas quotidiens, quasi persuadés du peu de chance probable pour que nous ayons un jour à regouter de tels délices.

J’ai gardé, je dois le confesser, le syndrome du petit four. A chaque fois que je suis dans un cocktail, un pince-fesse, une inauguration, un vernissage, une cérémonie officielle, je dois dire que ma motivation, voire mon obsession première, c’est le buffet. Il me tarde de découvrir les tables heureuses et colorées ou m’attendent les petits fours. Leur vue me met en joie, c’est Noël, je frétille, je m’excite tout seul, la vie redevient légère. Je pense que je vis la même excitation que celle de Maman au moment de plonger ses petits trésors dans le fond de sa pochette de soirée. Longtemps j’ai été habité par le fait que je me trouvais  à ce cocktail par erreur et que donc, avant que qui ce soit s’en aperçoive, il me fallait faire le plein de calories chics (et pas chères) car on ne sait pas de quoi les lendemains sont faits. Je me sens ridicule. Virginie D m’en a souvent fait la réflexion. Jusqu’à lors, je n’avais pas analysé cette compulsion frénétique. Je me contentais de me goinfrer. Par principe tous les petits fours me paraissent bons, j’ai l’impression qu’ils me sourient, qu’ils sont un traitement païen aux périodes de jambon-nouilles-noix-de beurre. Au début même, j’avais l’impression que tout le monde me regardait mais, très vite, je me suis concentré sur mon expédition, ma fringale, mon appétit de douceur. J’y ai toujours vu une récompense du genre « si je suis là, chez les bienheureux, c’est que j’ai du faire quelque chose de bien, j’ai bien travaillé ». Je double toujours mes prises. Le premier petit four d’un modèle sert uniquement à la découverte. Je le déguste lentement. Le deuxième est avalé plus vite. Je me force parfois à banaliser la situation mais je n’y arrive guère alors j’enchaine avec le modèle suivant : une prise, deux prises et quand il est vraiment bon, je m’autorise une troisième prise. Il faut alors quelqu’un de raisonnable avec moi pour me tirer par la manche  ou une vieille dame encore plus avide que moi ou un type baraqué qui m’écarte de la mêlée. Mes premiers buffets furent donc difficiles et teintés d’angoisses inconscientes venues de l’isthme panaméen. Je l’ai appelé le syndrome de l’ambassade. Avec les années—mais que ce fut long !— j’ai réussi à assumer le fait d’être là au milieu de gens bien mis, de femmes féminines à collants et d’hommes viriles en costumes moins affamés que moi, certes, mais tout aussi légitimes. Je mange les petits fours plus calmement. Parfois même, je prends le risque de m’écarter du buffet.

Je viens de vivre un moment paroxystique à l’inauguration de la Biennale des antiquaires au Grand-Palais mise en scène par Karl Lagerfeld. Oh comme tout était beau ! Ça sentait la crise économique de partout. On le voyait à l’âge des femmes accrochées aux manches des galeristes et des experts. On le lisait aux plis des peaux bien tirées ornées habilement de perlouzes authentiques qui mettaient en valeur des bronzages récents. A chaque coin de cimaise, une nouvelle dégustation. Là des sushis, ici un cochon de lait, plus loin des bouchées sucrées-salées, des vins de bordeaux bien tanniques, des macarons multicolores (pas de Pierre Hermé, je les connais tous par cœur). Je sautais de table en table en bon orang outan, à l’aise, facile presque, convaincu que j’étais des leurs, ayant parfois un mot aimable pour les petits serveurs en tenue. De temps en temps j’arrêtais mon regard sur un chef d’œuvre, ici un orientaliste, là une sculpture XVIII° en marbre blanc, derrière ce bureau 30 Mick Jagger, plus loin un ministre d’intérieur donc l’oncle était peintre.  Ce soir-là j’ai décidé que ma place était ici, que je pouvais manger sans me presser. De toutes façons Potel & Chabot avait fait en sorte que nous ne manquions de rien comme dans toute bonne crise économique qui se respecte. Nous n’avions même pas à nous bousculer ! Trop facile. J’y suis donc allé gaiement sur les sucettes en chocolat (bâtonnet chocolat, boule chocolat-miettes de noisettes, trempé dans une sauce au chocolat, un truc à se faire brûler vif sur une place publique), les canapés, les mousses, les toasts, les tout quoi… Avec les années, c’est sûr, ma place est ici. Chaque bouchée de paradis est un hommage à la naïveté de ma Mère.sucettechocolat1

 

 

 

5 mai 2012

AI WEI WEI et la question du doigt

Je me souviens avoir vu pour la première fois l’affiche de l’exposition de cet artiste chinois dans le couloir qui accède au quai du métro Voltaire à Paris. Il s’agissait d’un montage de plusieurs photos dont un autoportrait de l’artiste barbu en noir et blanc, des vues d’architectures, un soldat chinois, un doigt « d’honneur » devant un paysage… Je dois dire que c’est la photo de ce doigt « d’honneur » qui m’a intrigué et incité à aller voir l’expo. Je ne sais pas d’où vient l’expression « doigt d’honneur ». J’avais aussi vu deux ou trois sujets télé et lu de longs articles dans libération (que j’achète 3 fois par an, pas plus). Et puis, le fait de savoir que l’homme est assigné à résidence chez lui en Chine (c’est à dire en prison dans sa propre maison— pendant 3 mois en 2011 puis contraint de ne pas sortir de Pékin et de prévenir les autorités à chaque fois qu’il se déplace en ville—) et que, malgré cela, il résiste en interpelant l’opinion mondiale, mieux, que les gens lui envoient de l’argent du monde entier ou lui en jettent par dessus le mur d’enceinte de sa maison pour l’aider à payer l’amende astronomique que lui réclame l’état fasciste chinois me paraissait relever d’un fait de société remarquable. L’art actuel manque de causes nouvelles et donc de martyrs. Or nos bonnes masses populaires et leurs commentateurs ne s’intéressent au monde que s’il s’y passe un peu d’effusions, d’explosions, de cris et de larmes. Dans quel état totalitaire « moderne » peut-on trouver des martyrs pertinents ? En Chine of course !

Nous nous retrouvons donc au Jeu de Paume, impatients de découvrir cet artiste prisonnier qui a tant de choses à dire sur le monde et au monde. Rappelons que Ai Wei Wei n’est pas n’importe qui. Il est le fils de Ai Qing, un des grands poètes chinois de la fin du XX° et que le parti communosciste au pouvoir envoya nettoyer les chiottes pendant 13 ans pour le rééduquer un peu et lui apprendre les bonnes manières (matières ?).

Le public est nombreux. Nous escaladons le long escalier blanc qui mène aux salles (dans le sens de la montée et aux toilettes en descendant). Ai wei wei est essentiellement photographe. La première salle est consacrée à des agrandissements de planches contacts noir et blanc de photos de Chine, puis de son séjour new yorkais (1983-1993). Ce qu’on appelait dans les années 70/80 des photos de constat. C’est à dire pas des photos remarquables sur le plan esthétique mais plutôt sur le plan de ce qu’elles racontent, de ce dont elles témoignent. Urs Stahel, le commissaire de l’expo du jeu de Paume, dit lui-même qu’il est un maniaque qui photographie quasiment chaque seconde  de sa vie. De fait il apparait beaucoup dans ses clichés, dans toutes sortes de situation et souvent en très gros plans puis-que c’est lui qui tient l’appareil. Le type veut témoigner frénétiquement du monde qui l’entoure et de lui dans le monde qui l’entoure. Il s’inscrit donc dans une démarche comportementale, une posture vis à vis de la société plutôt que dans une quête esthétique à l’instar des artistes des années 60/70 qui dénonçaient l’art bourgeois, les effets de salons. Il n’est pas là pour faire joli. On raconte qu’il a pris (ou fait prendre) à peu près 200.000 photos entre son séjour à NYC (1983 : 100.000) et 2005 (retour à Pékin en 93) et exploration de l’actualité urbanistique et sociale chinoise. Par ailleurs c’est à ma connaissance une des premières fois que son travail de bloggueur et de twitter (Twittart comme dirait Fischer) est revendiquée comme une pratique artistique en tant que telle et qui vient donc s’ajouter à : sculpteur, architecte, designer, plasticien,… ce qui en soi est assez rassurant. Ses twittposts sont d’ailleurs la part la plus impressionnante de son travail dans la mesure ou le type doit être un des rares (au monde) à parler de la question de l’art, du rôle de l’artiste et de la notion de liberté dans le monde contemporain et sur un support conçu pour rester superficiel, bref et fast.

Ceci étant dit. Ma principale motivation pour écrire ce petit billet est la suivante. Je veux absolument, et en toute modestie néanmoins, soulever une erreur sémantique grave et (profondément) regrettable : la question du « doigt d’honneur » (les chauffeurs routiers appellent ça un « doigt gras » ou même « un doigt ». Prdon pour la trivialité des propos qui suivent.

En effet Aï (nous l’appellerons Aï, c’est plus drôle et plus pratique à taper sur le clavier) s’est employé assez systématiquement à photographier sa main gauche avec le majeur relevé devant des monuments de tous les pays. Le doigt visite ainsi la place Tienanmen, la tour Eiffel, le Palais des Doges, le Duomo de Florence, la Maison blanche, la Sagrada Familia, le Parlement de Londres, la Tate Modern, etc… Le plus drôle c’est le titre « Etude de perspective ». Le catalogue explique qu’il est ici fait allusion au pouce que tend traditionnellement le peintre ou le dessinateur pour mesurer les proportions de ce qu’il va représenter sur sa toile ou sa planche. Quand au cartel qui légende la série de l’expo, elle mentionne qu’avec cette imagerie, l’artiste invite le spectateur à réfléchir sur la question du pouvoir  de l’art officiel sur les consciences. Or c’est là qu’est le malaise.

Petit rappel : tout ceux, et ils sont nombreux, qui pratiquent le geste érotique consistant à donner du plaisir avec son doigt, savent qu’il s’agit là d’un moyen efficace. Je ne rentre pas dans le détail des orifices érogènes ou proéminences se prêtant facilement à cette fin. C’est assez gênant comme ça d’en passer par là pour parler d’art … Reconnaitre ce point de détail érotique et réhabiliter le doigt bien mis dans sa vocation au plaisir partagé des sens contribue, je pense, à dénoncer un glissement sémantique fâcheux qui peut, certes, leurrer les automobilistes pressés ou les camionneurs lourdaux mais pas un artiste expert en nudité comme c’est le cas de notre ami Aï. Il faut absolument et urgemment rétablir l’idée selon laquelle un « doigt » n’est en rien une injure à qui que ce soit, ni même un problème mais au contraire un moyen facile d’accéder à une forme plutôt immédiate de jouissance. Il faudrait donc s’ôter de l’esprit qu’un « doigt d’honneur » est une injure ou une humiliation alors qu’il est fondamentalement une invitation au plaisir.

Autrement dit, et contrairement à ce qui est dit, les images d’Aï signifient « j’aime » (je « like » en langage facebookien) ou bien « je t’aime » ou bien encore plus trivialement « je te prends » donc « je vais te donner du plaisir ». Ce qui est une perspective assez réjouissante en soi et une invite plutôt bourrée de convivialité et d’intentions sensuelles. Soit dit en passant, il en va de même pour les automobilistes qui, pensant qu’ils s’injurient à force de doigt en l’air, s’invitent (sans le savoir) au délicieux plaisir de la pénétration digitale ou de l’attouchement vénusien. (l’automobile ne rend pas intelligent, sinon ça se saurait).

 

De fait, C’est bien de plaisir (voire même d’extase) qu’il s’agit lorsque je contemple le palais des Doges, la tour Eiffel, un paysage de Toscane ou Central Park, et même, soyons fous, la place Tienanmen et ses militaires en rang serrés qui s’y entrecroisent sous le regard si doux et la mine joviale de ce vieux Mao Ze Dong. Cette série d’image est donc fondamentalement crétine et relativement facile à faire. Pas grave, les artistes, même sous l’opression, surtout sous l’opression, ont le droit de se tromper.

Ce point sémantique étant résolu, il faut revenir sur la question de la nudité dans l’art puisque c’est une des données de l’imagerie d’Aï. Aï aime être nu, seul ou avec des amis. Il a raison c’est assez agréable. Pour commémorer le massacre de Tienanmen (89), il a pris une photo de sa femme soulevant sa robe et donnant à voir sa culotte sur la grande place de Pékin (40 fois grande que la Concorde si l’on en croit le Trivial Pursuit). C’est assez charmant comme image. En outre à chaque fois qu’il est donné l’occasion de voir les dessous d’une fille, faut pas se priver. Il y a longtemps qu’ici, dans notre société démocratique occidentale, la nudité n’est plus dérangeante (encore que). Elle tapisse nos murs, nos couloirs, nos écrans, nos journaux. Elle ne constitue plus une arme de contestation. Ici tout le monde montre sa culote, c’est même plutôt à la mode. De fait il n’y a que dans les sociétés totalitaires (athées ou religieuses) que la nudité puisse être assimilée à de la pornographie ou à de la provocation politique. Là le corps dans sa plus simple expression, le droit de l’homme (ou de la femme) à être nu(e), sont plus efficaces qu’une encre de Chine, un poème ou un graffiti. Les avant gardes sont toutes passées par le nu (Manet, Schiele, Picasso, Klein, Gina Pane, Burden, …). On peut le regretter. En effet devoir montrer sa zigounette ou demander à sa fiancée de soulever sa robe sur une place publique pour être sûr d’être vu, ça vous complique franchement l’existence même si ça vous fait accéder aux plus grands musées du monde. Heureusement ça n’est pas ce qu’il a fait de mieux.

Il y a autre chose qui me chiffonne ce sont ses dix ans passés à New York. Certes, il a du bien s’éclater mais j’en ai assez  de lire à longueur de catalogues qu’ils (les artistes remarquables) reviennent tous avec les mêmes souvenirs ; les chapi et chapo du XXème siècles, Duchamp (et son chiotte) et Warhol et ses paquets de lessive. Notre Aï n’a vu personne d’autre de remarquable dans les années 80? Dans les rues, les télés, les bars, les nouvelles galeries, les nouvelles musiques…? Rien, personne d’autre ? Et puis il a photographié les gens de la rue, les flics new yorkais réprimant un rassemblement (de quoi ?), lui à Time square (nous sommes tous des touristes), du William Klein en version chinoise et en moins bien. Une imagerie compulsive d’un type qui veut mettre le monde en boite. Nos magazines en sont pleins.

Oublions cela.

Là où Aï est vraiment fort et retrouve une dimension poétique unique c’est dans ses posts sur twitter ou sur son blog. En voici un exemple : « reject cynism, reject coopération, reject fear and reject tea drinking ( = subir un interrogatoire par la police politique dans le langage de la blogosphère), there is nothing to discuss. It’s the same old saying : don’t come looking for me again. I won’t cooperate. If you must come, bring your instruments of torture with you. »

Là c’est un homme, un seul homme, qui défie un Pouvoir, un Système, un Parti. C’est l’esthétique de la lettre ouverte lue, grâce au numérique, par le monde entier.

« How could we have degenerated to this ? Without individual voices or the free exchange of information, neither the people nor the prolétariat can exist, and there can be no common interest for humanity ; you cannot exist. Authentic sociétal transformation can never be achived in such a place because the first step in social transformation is to regain the power of freedom of speech. A society lacking freedom of speech is a dark, bottomless pit. When it’s this dark, everything begins to look Bright ». Ses photos de chantiers d’architecture ou de destructions de qurtiers ou de villes sont aussi extrêmement éloquentes et puissamment dérangeantes. Ce mec a quand même vachement de courage.

 

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L.O.V.E de Maurizio Cattelan

(sculpture implantée devant la bourse de Milan en 2011)

15 février 2012

DE L’INCONVENIENT DE MOURIR

 

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"Dieu? il est comme le sucre dans le lait chaud, il est partout mais on ne le voit pas".
Coluche

 

L’idée d’avoir à mourir un de ces jours m’est assez désagréable car on est prévenu ni de la date, ni de la cause, ni du lieu. J’ai beau me dire que la vie telle qu’elle est conçue est une farce, je n’arrive pas à en rire d’un rire franc et massif. Je ne vois pas l’intérêt de disparaitre compte tenu du fait que j’ai énormément de choses à faire, un emploi du temps surchargé, des projets plein mes cartons et des invitations à honorer en ville. Je ne peux donc pas me permettre de tout laisser en plan comme ça et je n’ai pas envie qu’on vienne fouiller dans mes affaires en mon absence.

A titre d’exemple mon œuvre picturale est encore embryonnaire, j’envisage d’écrire un roman, j’ai une biographie en cours et j’aimerais apprendre le piano afin d’improviser des jams dans les boîtes de jazz pour me faire des nouveaux amis et impressionner les filles. Sans compter que j’aimerais changer de métier tous les 10 ans à peu près pour éviter la routine (et pourquoi pas garçon de plage pour voir). Ce qui implique à chaque fois, une formation approfondie, une période d’adaptation, quelques années de rentabilité, la mise au point d’un réseau de relations lié à cette nouvelle profession, un déménagement éventuel et des démarches administratives conséquentes, etc.

Un des inconvénients majeurs de la condition humaine consiste à l’évidence à être dotés (doués ?) de cette conscience, celle de devoir mourir un jour. C’est là que le bat blesse, n’est-ce pas ? Nous sommes prévenus, mis en examen, au mieux, en liberté surveillée, de toutes façons sursitaires.

Heureuse la biche qui broute paisiblement l’herbe fraiche dans le bocage normand au petit matin lorsqu’à travers les lambeaux de brumes qui se déchirent silencieusement, le soleil darde, tel un éclairagiste de spectacle, ses premières gloires pour donner encore plus d’allure au petit matin (ambiance hamiltonienne volontairement cul-cul mais efficace). Heureux le héron cendré qui, pendant sa trempette de début de mat’, observe la biche d’un air niais et vaguement indifférent, les deux ayant en commun de sembler étrangers au fait que, sournoisement tapis dans les buissons d’aubépine, un renard envisage de faire de ces deux créatures à poils et à plumes un repas complet. Encore qu’à y regarder d’un peu près, on ne peut que constater que la biche a l’air d’être franchement stressée si l’on en juge au nombre de fois où elle relève nerveusement la tête guettant de droite et de gauche le moindre bruissement, le plus imperceptible mouvement dans le camaïeu de verts qui habille son environnement. La biche est stressée, certes, mais sait elle qu’elle va mourir pour autant ? Pas sûr, non. Le héron non plus. Et puis leur intérêt pour les renards est très relatif, voire inexistant, alors.  Ce que l’on peut éventuellement affirmer c’est que ces deux-là sentent que quelque chose de pas clair se trame, mais quoi ? Aucune idée. Ils ne mènent pas pour autant une étude socio-analytique sur le renard.
Toute hypocrisie mise à part, je dois avouer qu'évidemment je n'envie pas la condition du gnou qui est sous la menace du premier fauve lubrique errant dans la savane et aussi des crocodiles qui attendent sans se brosser dans l'eau saumâtre du gué  où devra passer le peuple gnou au rique de faire bouffer le cul et le reste sans esquisser la moindre contestation. J'associe donc d'autant plus volontiers le peuple gnou à ma requête du jour. Tandis que l’humain, équipé de son esprit frondeur et curieux, ne peut s’empêcher d’essayer de comprendre comment c’est fait, comment ça marche, comment c’est arrivé. Pire, ses tendances obsessionnelles compulsives le conduisent à faire l’inventaire de tout ce qui l’entoure. Alors il s’agite, il s’agite, il prend des notes, organise, classe, archive, recopie, répète, enregistre et tache d’élaborer quelques conclusions qui puissent être utile dans une perspective fantasmée d’éternité. Il pousse parfois le vice à théoriser sur tout ce qui bouge. Il a cette fâcheuse propension qui l’empêche souvent de dormir, à vouloir étudier une chose sous toutes ses coutures. Ainsi d’un ballon par exemple. Il en fabrique de tous les formats pour tous les usages : billes, balle de golf, de tennis, de pingpong, de baseball, de volley, de hand, de basket, de rugby, de polo, sur herbe, dans l’eau, en l’air, pour voler, avec un moteur, des ailes, du gaz, du vent, pour marcher dessus, en jonglant avec des quilles, en tenant une pile d’assiette au bout d’un bâton, en plaçant un éléphant dessus, en obligeant une otarie à tenir le ballon en équilibre sur son museau, etc… En même temps, il prend des notes, filme, photographie, raconte, rapporte, relate, analyse, théorise, affirme, émet des hypothèse…

L’humain s’occupe. Lui aussi sent qu’il y a un truc à trouver, une réponse, quelque chose d’intelligent qui le ferait dialoguer avec l’univers tout entier. Il s’angoisse, sombre dans l’alcool, la drogue, les jeux d’argent, la jalousie, voire les tics et les tocs. Pendant une vingtaine de siècle, Dieu fut une réponse assez pratique.

Contrairement à ce qui est dit, l’homme a créé Dieu à son image.

Non, vraiment tout cela est mal conçu. Mourir, quelle connerie ! Qui a conçu une telle ineptie ? Tu débarques dans les larmes et les cris, tu vas à l’école à reculons par angoisse des devoirs sur table de mathématiques, tu passes le bac avec l’aide de tes premiers lexomil, tu choisis une filière d’études qui n’a aucun rapport avec tes aspirations profondes et tes gouts musicaux puis tu te retrouves à faire un métier qui t’éloigne encore plus des plages de sables fins, des concerts de ton groupe préféré, des cabanes dans les arbres et de tes envies de boire des cafés en terrasse sur le boulevard Saint Germain en regardant les filles défiler à moitié nues. Tu bosses, tu pars en vacances dans les emboutts, tu prends des crédits pour payer tes crédits, tu essaies d’éviter les attentats suicide, et les crash d’avion, tu deviens fan du club de ton village parce que c’est ton village et puis tu te retrouves  après 60 ans avec des rhumatismes, du cholestérol et le souffle court à compter tes points de retraite et tes points de permis. Et tu vis toutes ces occupations avec l’angoisse de faire un AVC ou un infarctus ou de déraper sur ton savon de Marseille qui te trahirait à ta descente de bain.

Qui peut avoir conçu une telle farce ?

Tout ça pour ça ? Se retrouver dispatché, rien, poussière et cendre ? Au mieux un nom sur une plaque de rue ou une ligne dans un dictionnaire ? Ridicule.

Tu es là, tout se passe bien, les filles sont belles, il y en a même une qui te dit qu’elle t’aime, l’été la chaleur fait office de vêtement, les jeux sont de plus en plus interactifs, les billets low-cost te permettent d’aller courir nu sur une plage de sable blanc à moindre frais et il faudrait que ça s’arrête ?! Naze, j’te dis. N’importe quoi ! Qui a fait ça ? Des noms, je veux des noms ! Dieu, c’est Dieu ? C’est lui ? Il est où? Appelez-moi le gérant!

Si c’est Dieu qui a conçu ce système de vie et de mort, eh bien moi je dis « c’est nul, super mal gaulé le truc, très mal pensé depuis le début, mal foutu quoi, voire même assez antidémocratique, un travail bâclé, exécuté à la va vite qui témoigne d’un esprit d’approximation et d’un tempérament emporté, brouillon ». Pas brillant Dieu sous ses airs de vieux sage barbu immaculé se confondant avec la blancheur virginale d’un brave cumulo-nimbus entre deux livraisons d’eau potable.

On est là, y’a une bonne ambiance, je commence à trouver mon style et à comprendre quelques chose à la musique sérielle, mon PEL va arriver à échéance et il faudrait que ça s’arrête ? Mais tu rigoles Dieu !

Je pense que la mort qui nous sépare de ceux que l’on aime est une assez mauvaise idée tant pour ceux qui disparaissent que pour ceux qui restent encore un peu.  Dieu a merdé à deux ou trois exceptions près (l’invention du chocolat, les Beatles, un bon Bordeaux, les jolies filles, la vision des biches dans le sous bois, les macarons Pierre Hermé, …). Pour le reste, c’est pas brillant Dieu. Il aurait même un petit côté charlatan.

Je pense qu’au lieu de mourir, on aurait pu faire en sorte que les êtres qui ont fini leur séjour sur terre soient envoyés ailleurs dans l’univers (pas dispatché façon puzzle hein, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit). Ce dernier étant assez grand pour cela, on aurait pu caser tout le monde (animaux et êtres humains) toutes époques confondues en faisant en sorte que le type qui vient de quitter sa vie terrestre soit frappé d’amnésie (à l’aide d’un petite lampe flash comme dans Men in Black) et ainsi capable de recommencer autre chose ailleurs sans que sa famille ou ses collègues de travail ne lui manquent. Le charme aurait été que tu eus pu te retrouver dans une nouvelle vie hybridée par des êtres venus d’âges différents ; exemple ; un Louis XIV avec des dinosaures dans les champs et des groupes de mariachis sur les places de marché. Toute nostalgie eut ainsi été impossible ce qui évite d’entrée un certain nombre de souffrances inutiles, de nuits blanches vaines et de frais inutiles chez un psy fumeur de gitanes.

Nous aurions pu même être prévenus d’entrée que le grand départ est obligatoire. Nous aurions même pu avoir le choix dans la date (…). Les adieux auraient peut-être été un peu pénibles mais somme toute bon enfant car annonciateurs d’une nouvelle vie, d’un rajeunissement et d’expériences nouvelles. De la même façon le corps aurait été conçu d’une façon beaucoup moins complexe. On aurait évité, bien entendu, toutes les fonctions sordides.

Au lieu de cela, on ne peut que constater la perversité des intentions de Dieu, son autoritarisme pathologique, ses intentions brouillonnes (gestion des cadavres, recours systématique à la guerre dans les sociétés humaines…), son humour cynique et discutable. L’humour céleste consistant à nous enlever des êtres qui nous sont chers me parait plus que douteux, voire grossier. S’agit il d’un serial killer ? Faut-il obligatoirement employer la terreur pour garantir ses chances d’être adoré ? Autant de questions qu’il convient de se poser avec courage.

Tout cela est très mal conçu. Raison de plus pour ne pas croire au vieux barbu sénile.

31 octobre 2011

Ch'ui où? Ch'fais quoi?

homme_portable

 

J’avais entendu parlé de lui dans les rayons des librairies, dans l’émission de Finkielkraut, dans certains emportements outranciers d’Elisabeth Levy dont je me demandais où elle pouvait avoir attrapé une telle propension à l’agacement, voire à l’emportement et enfin chez Lucchini lorsqu’il lui consacra un spectacle de lecture à l’hiver 2010/211. Philippe Muray, lui-même. Depuis Baudrillard (le Baudrillard des années 80) je restais sur ma fin au rayon des penseurs extralucides, des types capables d’y voir clair au travers des rotondités du miroir déformant de la société actuelle et d’avoir le courage de dénoncer TOUT (ou quasiment ou à tout le moins de dénoncer les dénonceurs cf. « Jaccuse ».2002) s’il en ressent l’urgence au prix d’une grande solitude voire d’un mépris généralisé. Je cherchais un héritier de l’auteur des « cool memories », un Cioran moderne, un jongleur de concepts, un type qui sache encore dire merde avec de la classe, du verbe large, de la folie crottée de terre sous la semelle. Philippe Muray est de ceux là. Il est de ceux en tous cas qui acceptent (assument ?) l’idée que l’univers n’a pas de sens.

« Qu’est ce que c’est que ce merdier ? » s’exclame t’il du fond de son bureau. A le lire avec un peu d’insistance, je constate qu’il n’est pas seulement un agacé (agacez-vous !) mais un type, c’est vrai, assez réactionnaire, contre à peu près tous les effets récents de la modernité, voire contre ce qui fait la contemporanéité, l’innovation, le changement, l’évolution des mœurs ou les dimensions populaires de la culture. Je dois dire que c’est ce qui fait son charme au loustic malgré la violence de certains de ses propos.

Il est habité par une sorte de dégout du vulgaire assez bien incarné, il est  vrai, par l’image de l’individu actuel qu’il décrit comme un type auto satisfait de son petit bonheur matérialiste déambulant en bermuda et en tong dans des centre commerciaux. Il faut bien reconnaitre qu’il n’a pas tout à fait tort. On pourrait ajouter à ce portrait type de l’homme (post)moderne quelques détails croustillants auxquels il n’a peut-être pas pensé ; cet homme moderne a la boule à zéro (par gout pour l’esthétique concentrationnaire et aussi pour dissuader son voisin de l’embêter, surpopulation urbaine oblige), il mâchonne un chewing gum, il arbore une marque connue imprimée sur son t-shirt, il porte un petit sac à dos fluorescent multi poches, ses bras ou l’un de ses deux mollets sont tatoués de motifs maoris noirs très en vogue dans les milieux violents et qui, là aussi, ramènent le quidam de macadam à une sorte de pseudo primitivisme kitch et indélébile qui ne fait qu’ajouter à la dimension débile de l’ensemble. L’attribut majeur de l’individu moderne  auquel Muray n’avait pas pensé, c’est le téléphone portable. Il n’y avait pas pensé parce qu’à quelques années près, sa mort prématurée l’a privé d’assister au spectacle cacophonique de l’homme moderne connecté avec le monde entier. Il en aurait probablement fait un chapitre de «Moderne contre moderne » non sans se laisser emporter par l’agacement agressif qui le caractérisait.

Je me souviens de la première fois que j’ai vu des téléphones portables. C’était en 1995 à Bahrain où je faisais un freelance dans une agence de réclame. Dans les larges allées de marbre et de verre des business centers de Manama, je croisais, éberlué, des hommes d’affaires en djellabah coiffés d’un « torchon et d’une courroie de ventilateur » comme disait Dan mon acolyte dépressif. Tous ces types tenaient à la main des petits téléphones qu’ils accrochaient à leur poche de djellabahs après avoir fini leurs conversations. Peu de temps après, ces téléphones de voyage (comme il y a des cendriers de voyage) sont apparus en occident puis se sont répandus dans toutes les couches de la population. Au début, nous avions tous l’air d’hommes d’affaire avec ces engins en main. Nous donnions l’impression de traiter des dossiers qui ne pouvaient pas attendre. Ca sentait déjà le ridicule, l’accélération du temps. Le premier intérêt que j’y vis, assez dérisoire j’en conviens, fut que l’on pouvait appeler un ami pour lui demander le code de son immeuble au moment d’arriver chez lui. Fini les cabines téléphoniques parisiennes « hors services » ou baignées dans l’odeur d’urine. La sensation de téléphoner en marchant ou en conduisant était géniale, auto-bluffante, quoi. Il y avait un côté pratique indéniable. Comme toutes les inventions pertinentes (un bon vaccin, un épluche légume, un stylo 4 couleurs, des post-it, …) très vite tout le monde en veut, ça se démocratise et c’est comme ça que nous devenons tous des hommes d’affaires qui ont des problèmes urgents à régler, des décisions hyper complexes à prendre, des messages qui ne peuvent pas attendre, des confidences d’une priorité absolue.

Le monde est maintenant recouvert de gens qui ont quelque chose à dire de très important à quelqu’un qui n’est pas là.

Et c’est ainsi que dans les transports en commun, qui offrent bon nombre d’occasions quotidiennes d’apprécier l’humanité sous toutes ses formes,  on entend désormais des pans de conversations entiers qui, en des temps pas si reculés, n’auraient concernés personne d’autres que la personne et son interlocuteur dans un dialogue privé, discret, voire pudique. Au lieu de cela chacun y va aujourd’hui de son déballage au milieu de la foule interlope des grandes cités, vociférant des complaintes professionnelles, mettant au point des rendez-vous, déblatérant sur un chefaillon comme s’il se trouvait dans sa salle de bain ou dans le couloir de son placard-cuisine.

Au début des années 2000, des études avaient tenté d’analyser l’usage qui était fait de la petite boite magique qui parle. Elles démontraient notamment que la phrase la plus prononcée dans les conversations était ; « T’es où, tu fais quoi ? ». En réalité il s’agissait de la phrase qui commençait la majorité de nos conversations téléphoniques. Il y a pire encore car l’individu post-moderne vivant en démocratie libérale n’a pas de limite dans l’impudeur et s’estime toujours dans son bon droit. Le pire c’est ce besoin, né de l’utilisation d’un autre besoin  (l’utilisation du téléphone portatif … ), de dire ce que l’on est entrain de faire. Ainsi outre les conversations intempestives les plus triviales, il est spécialement amusant (et en même temps prodigieusement agaçant) d’entendre les gens dire ce qu’ils font à des moments cruciaux de leur existence. On peut donc entendre des choses aussi édifiantes que « je sors du bus », « je rentre dans le métro », « je sors du supermarché », « je suis dans la rue »,  … et j’en passe et des meilleures, non ?

Il est assez consternant d’observer dans un wagon de métro le nombre impressionnant de personnes entrain de se tripoter le portable. Je ne parle pas de la mode qui consiste à écouter de la musique au casque à n’importe quel moment de la journée et ceci malgré le vacarme assourdissant du métro qui n’a pas été franchement conçu pour les mélomanes. Un de mes amis prétendait « qu’il n’est de pire sourd que celui qui écoute du Vivaldi en mangeant une biscotte ». On peut appliquer cette maxime à l’univers souterrain des métros de déportés de la nouvelle économie mondiale. De la même façon, il est déprimant de constater que les journaux d’opinions ont quasiment totalement disparu de l’espace public au profit de journaux gratuits remplis de nouvelles brèves rédigées par des publicitaires anonymes et sur lesquels nos tripoteurs de portables se ruent à l’entrée des bouches de métro. Nous assistons en direct depuis deux ou trois ans à la disparition de L’Humanité, Libération, Le Monde et autres hebdos qui travaillaient à l’information critique des masses (même plus laborieuses). Les masses elles-mêmes se sont fondues dans la masse. Aujourd’hui quand on sort du métro on tire son portable de la poche comme on tirait son paquet de clopes pour s’en tirer une. Le dernier sms fait l’effet de la première bouffée. « Ouf, j’ai un message » expire le citadin avant de répondre avec deux doigts «  je sors du métro ». Ce qui m’invite à penser qu’un jour le législateur procèdera avec le téléphone comme avec la cigarette. De la même façon qu’il y a des zones non fumeurs, il y aura des zones « sans téléphones » (interdit de se tripoter la puce). Sous peine d’amende évidemment. Alors nous pourrons nous reparler, lire des phrases longues (livres), des articles engagés (presse libre), et écouter notre « voix du dedans » comme disait Léo Ferré.

L’autre jour dans l’avion, la chef de cabine avait fait une annonce juste après l’atterrissage demandant aux passagers de ne pas rallumer leurs portables avant d’avoir pénétré dans l’aérogare. Aussitôt que l’avion eut marqué son arrêt définitif et plusieurs minutes avant que nous ne puissions descendre de l’appareil, la quasi totalité des gens rallumait la boite à blabla pour informer un absent de cette nouvelle urgentissime « je viens d’arriver ».

L’adolescent de 13 ans qui vit avec nous est comme tous les enfants, il prend le monde là où il en est. Le téléphone portable est donc un appendice naturel de sa vie sociale. Depuis qu’il a son propre blackberry, il ne le lâche plus et se trouve en conversation permanente avec ses copains. Ils ont des choses urgentes à se dire toute la journée. Il n’est donc pas rare d’avoir en face de nous un adolescent qui se tient tête baissée, les yeux rivés sur le dernier email, le dernier post sur facebook, le dernier twitt, et qui, en même temps, écoute ce qu’on lui dit et procède par petites réponses brèves et insincères du genre « oui ok ». Quand il marche dans les rues, son portable virevolte entre la poche arrière de son jean’s et ses mains. Sa maman prédisait que, peut-être, le portable allait remplacer la cigarette… dans la série des maniaqueries nerveuses et systématiques. A mon avis on va plutôt assister à un cumul des compulsions histoire de bien préparer le XXIème siècle. Je sors du métro, j’allume une clope, j’appelle quelqu’un pour lui dire que « je sors du métro ».

Voici donc la nouvelle posture de l’Homme Moderne : une silhouette mal attifée, un bras replié, un coude en avant, une main collée à l’oreille, l’autre dans la poche. Nous sommes loin du nombre d’or de Leonard de Vinci dressant la figure droite et bien proportionnée de l’homme nu, cheveux longs et abondants, bras le long du corps ou ouverts pour embrasser le monde, pieds joints ou légèrement écartés pour s’inscrire dans les deux figures fondatrices de l’univers, le cercle de l’harmonie et le carré de la construction.

Des recherches récentes révèlent que la notion de vie privée va disparaître dans les années à venir non seulement à cause des ingérences possibles du système dans nos vies privées par les voies du marketing et du numérique mais aussi parce que, muni de l’équipement minimum nécessaire, chacun éprouve le besoin de raconter, montrer, exhiber sa vie, dire son avis, dire où il est, d’où il vient, où il va, s’il aime, s’il n’aime pas… On dit « liker », je like, je ne like plus, tu likes, il like, nou likons,…faire un like. Likez vous les uns les autres! La trivialité bat son plein. Je suis un sauvage social.

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